Il nous a quittés en 2020 : Ennio Morricone, la mort d'une icône !

     Le 6 juillet 2020, coup de tonnerre sur le cinéma italien, et même sur le cinéma mondial : Ennio Morricone, le grand Ennio, le maestro, la légende, le mythe, le touche-à-tout du 7ème art, bref, le plus grand compositeur du monde qui ait pu exister a tiré sa révérence à l'âge honorable de 91 ans.

Le monde se divise en deux catégories : Ennio et les autres.

     Ennio Morricone, en quelques chiffres qui vont rapidement vous donner le tournis, c'est plus de 500 musiques de films, dont la moitié, sans exagérer, sont des chefs-d'oeuvre reconnaissables dès les premières notes : Le Bon, La Brute Et Le Truand, Mon Nom Est Personne, Le Clan Des Siciliens, Le Professionnel, Il Était Une Fois Dans L'Ouest, ...

     Morricone, c'est 70 millions de disques vendus, rendez-vous compte, c'est-à-dire presque 7 fois le budget du film Qu'Est-ce qu'on a fait au bon Dieu ? ... Ça en fait des pâtés aux truffes pour ce bon Christian Clavier !

   Morricone, ce sont des centaines de collaborations avec des réalisateurs renommés : Quentin Tarantino, Pier Paolo Pasolini, Brian De Palma, Dario Argento, Oliver Stone, Terrence Malick, Wolfgang Petersen, Franco Zeffirelli, Roman Polanski, Georges Lautner, John Carpenter et bien sûr son plus grand ami Sergio Leone !

     Morricone, c'est plus d'une quarantaine de nominations visant à récompenser son travail, plus d'une vingtaine de prix obtenus et, parmi ceux-ci, seulement deux Oscars (oui, seulement, car un prodige comme lui en méritait largement plus !).

     Morricone, ce sont des titres honorifiques dans de nombreux pays !

     Morricone, c'est une étoile sur le Hollywood Walk Of Fame !

    Morricone, c'est cette magie qui vous prend aux tripes dès que vous entendez un de ses morceaux. La phrase suivante, que j'ai vue passer sur un site d'informations, résume parfaitement l'apport du bonhomme au cinéma : "Avec Morricone, un mauvais film devenait un bon film; un bon film devenait un très bon film; un très bon film devenait un chef-d'oeuvre à voir absolument dans sa vie !"

    Enfin, Morricone, c'est 57 ans de cinéma répartis sur 74 ans de carrière. Tout simplement prodigieux, inégalable, ce n'est pas pour rien qu'on l'appelait le maestro !

     Ainsi, parce que, à Cine Qua Non, on aime la culture mais avant tout le cinéma, et parce que, sans Morricone, notre vision du cinéma ne serait pas la même aujourd'hui, nous avons décidé de vous proposer une brève rétrospective de sa vie (je vous assure que c'est bref, étant donné tout ce qu'il y aurait à dire sur le bonhomme !) assortie en fin de chronique d'un top 10 totalement subjectif sur ses meilleures B.O. de films et de quelques fun-facts à deviner et à déguster entre amis et sans modération.

Il était une fois... Ennio

Un cadre privilégié

     C'est en 1928 à Rome que le petit Ennio voit le jour, dans une famille somme toute nombreuse, 5 enfants au total. Son père, Mario de son petit nom, n'est pas plombier mais trompettiste de jazz dans des orchestres, de quoi dérouler le tapis rouge pour la carrière du fiston. De toute manière, chez les Morricone, on est compositeur de père en fils : Mario, Ennio et Andrea, le fils du second. Les deux derniers ont d'ailleurs collaboré ensemble sur les dernières années de vie du maestro. Quel plus beau passage de témoin sinon celui de l'héritage père / fils.

     Le petit Ennio a donc le privilège d'avoir un père musicien qui ne cessera de l'encourager dans cette voie. Il sera d'ailleurs son premier professeur, c'est dire l'importance et l'impact qu'a eu ce père sur le futur prodige.


Une vie émaillée de rencontres

     Car oui, outre la présence capitale de son père durant son enfance et son adolescence, la vie du jeune Ennio est marquée par des rencontres qui écriront son destin. Camarade de classe du futur grand réalisateur Sergio Leone, il a aussi l'occasion, lorsqu'il entre à l'Académie Nationale de Musique italienne en 1940, de rencontrer et de lier une amitié profonde avec Bruno Nicolai, autre compositeur de renom que l'on a pu entendre en France essentiellement sur des films italiens (Sergio Martino, Giuliano Carnimeo) ou espagnols (Jess Franco). Les deux auront d'ailleurs l'occasion de collaborer ensemble sur certains films comme Opération Frère Cadet, une parodie de James Bond avec le frère de Sean Connery (!!!) ou encore Compañeros, sublime western injustement oublié aujourd'hui avec le duo mythique d'acteurs Franco Nero / Tomas Milian.

Le fameux Bruno Nicolai que l'on ne connaît que trop peu en France

     Nicolai disparaît prématurément en 1991, tout comme Sergio Leone deux ans auparavant. Eh oui, c'est aussi ça Morricone, des amis précieux disparus trop tôt...

     Après l'obtention de différents prix en 1954, notamment celui de direction d'orchestre, Ennio se lance dans la musique classique et compose ses premières œuvres. Hélas, il faut bien reconnaître que celles-ci ne sont pas un grand succès et intéressent peu de monde hormis la RAI, groupe télévisuel national, qui l'engage mais dont il démissionne après seulement un jour de travail...

     Loin de se décourager, Morricone comprend rapidement qu'il lui faut se réorienter vers une musique plus "populaire", ce qu'il fait dès 1958, s'ouvrant ainsi les portes de collaborations prestigieuses avec des artistes comme Paul Anka, que l'on connaît en France pour sa reprise du Comme d'habitude de l'électricien Claude François sous le titre My Way, ou encore Rita Pavone, que l'on a pu voir dans des films avec Terence Hill. Bientôt, les portes du cinéma s'ouvrent à lui, ainsi que la reconnaissance mondiale et les opportunités de collaborer avec celles que l'on appelle des divas (il aura l'occasion de composer pour Mireille Mathieu en 1974).

De gauche à droite : Morricone, Mireille Mathieu, Sergio Leone. A savoir que Leone parlait un français irréprochable !


Compositeur pour le cinéma : un succès immédiat

     Tout juste lancé dans le milieu du cinéma dès 1961, Morricone devient très vite un artiste reconnu et il lui faudra à peine trois ans pour obtenir le premier grand succès de sa carrière. Ce succès, il l'obtient avec le western spaghetti Pour une poignée de dollars. Et devinez donc qui est le réalisateur de ce film ayant permis de révéler un tout jeune Clint Eastwood, jusque-là avant tout connu aux States pour son rôle dans la série western Rawhide ? Eh bien, c'est ce bon Sergio Leone, celui-là même avec qui notre Ennio a été camarade il y a plus de vingt ans auparavant.

     Le monde est petit finalement mais il permettra à Morricone, suite à ce succès, de composer pour des réalisateurs plus prestigieux sur les décennies 1960 à 1980. Ainsi, dès la fin des années 1960, il composera tour à tour pour des Européens reconnus comme Pasolini (Les Sorcières), Sergio Corbucci (Le Grand Silence / El Mercenario / Compañeros), Sergio Sollima (Le Dernier Face à Face / La Cité De La Violence), Henri Verneuil (La Bataille De San Sebastian / Le Clan Des Siciliens / Peur Sur La Ville), Bertolucci (Partner), Dario Argento (L'Oiseau Au Plumage De Cristal / Quatre Mouches De Velours Gris), Elio Petri (Enquête Sur Un Citoyen Au-Dessus De Tout Soupçon), Lucio Fulci (Le Venin De La Peur), Tonino Valerii (Mon Nom Est Personne), Édouard Molinaro (La Cage Aux Folles), Umberto Lenzi (La Rançon De La Peur), ...

Un film à voir si vous aimez les thrillers teintés de fantastique

     Déjà, dès la fin des années 1970, sa carrière prend un virage américain. On a ainsi pu le voir chez John Boorman (L'Exorciste 2), Terrence Malick (Les Moissons Du Ciel), Michael Ritchie (L'Île Sanglante), John Carpenter (The Thing), Brian De Palma (Les Incorruptibles), Richard Fleischer (Kalidor), ...

     Il ne délaisse pas pour autant le cinéma européen, y obtenant même de nombreux succès dans les années 1980 : Le Professionnel avec notre Bébel' national et le mythique Chi Mai qui rythme l'action (celui qui ne connaît cette chanson que par la pub Royal Canin mérite une rouste dans les burnes !), Le Ruffian avec Lino Ventura, Le Marginal toujours avec Bébel', Cinema Paradiso avec Philippe Noiret, Frantic avec Harrison Ford, et surtout Mission avec Robert De Niro, considérée comme une des meilleures bandes-sons qu'il a composée.

     Mais, sur ces décennies 1960 - 1980, Ennio Morricone restera avant tout lié à son ami le plus intime, Sergio Leone. Une amitié qui prendra fin brutalement en 1989 avec le décès prématuré du réalisateur à l'âge de 60 ans.


♪ Je n'ai pas d'ami comme toi, oh no no no ♪

A gauche, le petit Sergio; A droite, le petit Ennio

     Lorsque Leone et Morricone collaborent pour la première fois en 1964 sur le film Pour Une Poignée De Dollars, on sait d'avance que le résultat sera grandiose. Ennio Morricone débute dans le métier mais s'est déjà forgé une solide réputation de compositeur talentueux. Leone, lui, a déjà fait ses classes pendant plus de 10 ans en tant qu'assistant-réalisateur et il en est à son troisième long-métrage en tant que réalisateur. Un lien encore plus fort allait pourtant venir souder toute la distribution du film : le compositeur et le réalisateur se connaissent depuis plus de vingt ans; ils ont fait leurs premiers pas ensemble sur les bancs de l'école. Chacun a toujours plus ou moins suivi ce que l'autre faisait et chacun sait donc ce qu'il peut attendre de l'autre sur le plateau. Le rendu à l'écran n'en est que plus épique. Les prises de vues de Leone sont en harmonie parfaite avec le rythme du thème composé par Morricone. Le film, tout comme ceux qui suivront, a également l'avantage de bénéficier d'un des scénaristes les plus réputés de l'époque, Luciano Vincenzoni, considéré comme le plus talentueux des "script doctor" de sa génération ! Ce prodige nous servira des répliques de films qui font encore mouche à notre époque et dont l'on se souvient aisément si on affectionne les films de Leone.

     Ce premier succès du duo en amène deux autres, formant ainsi ce qu'on appellera plus tard "la trilogie du dollar" : Et Pour Quelques Dollars De Plus en 1965, ou quand la bande-son magnifique du maestro rencontre le sifflement le plus célèbre de l'histoire du cinéma, celui de l'artiste espagnol Curro Savoy. Mais, surtout, le fameux Le Bon, La Brute Et Le Truand en 1966, film culte maintes fois référencés dans de nombreux films dans les décennies suivantes (on peut notamment citer Retour Vers Le Futur III et la scène de duel face à Bufford Tannen, ou bien même le nom que Marty McFly se donne en 1885 lorsqu'il atterrit dans la ferme de ses ancêtres, afin de ne pas créer de paradoxe temporel : Clint Eastwood). Le Bon, La Brute Et Le Truand, c'est aussi une bande-son mythique devenue un classique parmi les classiques, un comble pour un compositeur qui a débuté par la musique classique sans y rencontrer un véritable succès !

On vous met carrément le générique d'ouverture, c'est magique !

     Les deux amis se retrouveront encore à trois reprises pour une nouvelle trilogie, celle des Il Était Une Fois... avec des épisodes cependant inégaux par rapport à la première trilogie. Le premier d'entre eux, Il Était Une Fois Dans L'Ouest en 1968, constitue l'apothéose de la carrière de Leone mais aussi de Morricone à cette époque. C'est un chef-d'oeuvre, tout simplement, servi par la prestation d'acteurs légendaires (Henry Fonda, Charles Bronson, Claudia Cardinale) et agrémenté d'une bande-son magistrale, L'Homme à l'Harmonica ! Le duel final entre Bronson et Fonda sur cette musique fait partie des plus grandes fresques de tous les temps.

     Vient ensuite Il Était Une Fois La Révolution en 1971, et là il faut bien reconnaître que, malgré la présence de figures hautes en couleur (James Coburn, Rod Steiger), le film est tout de même d'un acabit bien inférieur par rapport à son prédécesseur. Dernier western de Sergio Leone, le film peine un peu, tant au niveau du scénario que de la bande-son. Ce n'est pas un déchet, loin de là même, mais on était en droit d'attendre un chef-d'oeuvre. Là, on nous sert "seulement" un bon film...

     Le duo se réunit une dernière fois en 1984 pour le dernier long-métrage de la trilogie, Il Était Une Fois En Amérique, dont l'action se situe cette fois-ci à l'époque de la prohibition et du gangstérisme. Pas étonnant alors que le film fasse correctement le job quand on sait que le rôle principal est tenu par Robert De Niro que l'on a pu voir quelques années auparavant chez Martin Scorsese (Mean Streets, Taxi Driver) ou Francis Ford Coppola (Le Parrain 2).

Allô, Robert ? C'est Vito Corleone ! Tu m'aurais pas piqué mon job ?

     Qu'importe, malgré des succès moindres sur la deuxième trilogie, la relation entre Leone et Morricone restera une solide histoire d'amitié et d'humanité. Pour preuve, l'ami Ennio a même refusé de composer la bande-son du Orange Mécanique de Stanley Kubrick afin de se concentrer sur le dernier film de son ami Sergio. Si c'est pas beau tout ça !

     Leone et Morricone auraient pu se retrouver pour un dernier scénario tournant autour du siège de Léningrad mais la faucheuse en décidera autrement : l'ami Sergio est terrassé par une crise cardiaque le 30 avril 1989 à l'âge de 60 ans. Comble du mauvais goût, il est mort en regardant un film intitulé Je veux vivre !. Il laisse derrière lui un Ennio Morricone désormais totalement internationalisé, comme le montrent les décennies 1990 - 2000.


Les décennies 1990 - 2000 : retrait progressif du cinéma mais des succès toujours au rendez-vous

     Les années 1990 voient Ennio Morricone sollicité de toutes parts par des réalisateurs aux quatre coins du monde. S'il attache toujours autant d'importance à exposer la fierté de ses origines italiennes, en collaborant notamment avec des réalisateurs transalpins comme Franco Zeffirelli, Ducio Tessari ou Dario Argento, c'est désormais à Hollywood qu'il obtient le plus de succès : en 1990 avec Les Anges De La Nuit de Phil Joanou, en 1991 et 1994 avec Bugsy et Harcèlement de Barry Levinson, en 1993 avec Dans La Ligne De Mire de Wolfgang Petersen qui est l'occasion de retrouvailles avec Clint Eastwood, en 1994 avec Wolf de Mike Nichols, en 1997 avec U-Turn d'Oliver Stone et en 1998 avec Bulworth de Warren Beatty.

Jack Nicholson est Wolf, le loup-garou !

     Désormais adulé, tel Midas transformant tout ce qu'il touche en or, devenu sujet de conversation des élites culturelles, la Sainte Bible de tout cinéaste néophyte, l'ami Ennio ne cesse de recevoir des prix le récompensant pour tel ou tel film. Pourtant, il lui manque toujours une statuette qui le sacraliserait définitivement, la seule presque qui manque à son palmarès (on zappe bien sûr les Césars tous pourris qui ne sont que les excréments d'une élite cannoise beaucoup trop prout prout pour savoir ce qu'est le cinéma populaire) : il s'agit bien évidemment d'un Oscar. Il est déjà passé tout proche 5 fois, entre 1979 et 2000, mais, à chaque fois, chou blanc. Et le prodige italien devra encore patienter quelques longues années avant d'en recevoir un premier, puis un deuxième...

     Arrivé aux années 2000, après un dernier succès chez Brian De Palma avec Mission To Mars, Ennio Morricone ralentit fortement ses collaborations avec l'industrie du cinéma, préférant consacrer du temps à sa famille qu'il n'a pas vraiment eu le temps de voir grandir et s'agrandir. Rendez-vous compte qu'il lui est arrivé assez souvent de collaborer jusqu'à 5 ou 6 films sur certaines années. C'est tout simplement hors-norme ! Pour vous donner un comparatif, quand un réalisateur ou un acteur arrive à faire deux films dans l'année, il est déjà bien content ! Il faut se dire aussi qu'Ennio Morricone commence à se faire vieux et qu'il avance bon an, mal an vers ses 80 printemps. S'il possède toujours la clairvoyance d'un génie, il n'a plus la résistance physique d'un jeunot.

     Mais les vrais héros ne s'en vont jamais bien loin et, pour Ennio, l'appel de la musique se fait plus fort que lui.


Les années 2010 : Ennio en concert

      Morricone, c'est un infatigable, le genre de grand-père encore debout à 5h du mat' et qui a mis la race à tous vos potes alors que vous faisiez les malins en le pensant couché à 20h ! Alors, lorsqu'en 2010 il annonce une tournée mondiale, composée de plusieurs centaines de dates réparties sur plusieurs années, avec le prestigieux orchestre de Rome qu'il dirigera, les fans du bonhomme crient de joie et sautent au plafond. S'en sont suivis neuf ans de tournées, neuf années durant lesquelles il n'a cessé de jouer à travers le monde ses thèmes les plus célèbres : les western de son ami Sergio, le Mission avec De Niro, le Cinema Paradiso, mais aussi des bandes-sons moins connues comme celle du film Sacco Et Vanzetti auquel il avait participé en 1971.

     Les fans sont en liesse, c'est enfin l'occasion de pouvoir approcher le plus grand des compositeurs, lui qui a la réputation d'être un peu froid, distant et peu loquace avec son public. Pourtant, il n'en est rien. Même s'il ne le montre pas, Ennio est un homme au grand cœur, il sait ce qu'il doit à son public et, durant ses tournées, il ne va jamais cesser de le lui rendre. Ainsi, sur toutes les dates françaises qu'il effectuera durant ces années, un thème reviendra à chaque fois : le fameux Chi Mai qui accompagne Bébel' dans Le Professionnel. C'est ça l'amour, le vrai, pour Ennio; ce n'est pas celui qui se dit avec des mots mais celui qui se voit, qui s'entend et qui hypnotise.

Le fameux Chi Mai dirigé par le maître en live à Bercy en 2014


Morricone, un compositeur qui fascine la Nouvelle Vague

      Même s'il s'en est quasiment retiré, l'ami Ennio n'a pas perdu pied dans le milieu cinématographique. Mieux encore, il fascine les cinéastes de la Nouvelle Vague, ceux-là même qui ont grandi biberonnés avec ses thèmes de western ou de giallo.

     Parmi ces néo-cinéastes, un se détache : Quentin Tarantino. Ce dernier, que l'on ne présente plus désormais, n'a jamais caché son admiration pour tous ces réalisateurs, ces acteurs, ces compositeurs des années 1960 et 1970. Aussi, lorsqu'il se rend compte que la bande-son de son Kill Bill de 2003 mérite des ré-arrangements, Tarantino ne voit personne d'autre que Morricone à qui faire appel. Cette brève collaboration est un succès qui amène un regain de popularité pour Ennio, lui permettant d'obtenir enfin, à 79 ans, son premier Oscar récompensant l'ensemble de sa carrière. Le réalisateur et le cinéaste collaboreront de nouveau ensemble en 2009 sur Inglorious Basterds, en 2012 sur Django Unchained et en 2015 sur Les Huit Salopards qui permettra au maestro d'obtenir son deuxième Oscar à l'âge de 87 ans. C'est surtout un retour au western pour Ennio, quarante ans après avoir arrêté de se produire dans ce genre. La récompense obtenue n'en est alors que plus symbolique car elle prouve que, malgré un tel laps de temps, il n'a jamais rien perdu de son génie.

Le maître et son apprenti

     Le prodige italien fait un dernier passage en 2016 chez Terrence Malick, avec qui il a déjà collaboré 36 ans plus tôt, puis en 2018 sur un film mineur. Une carrière richement remplie que tout cinéaste doit envier et jalouser. Chapeau l'artiste !


Bonus n°1 : le top 10 des meilleures B.O. composées par l'ami Ennio :

10 - Dans La Ligne De Mire : Vous vous souvenez de cette phrase citée au début de cet article : "Avec Ennio, un mauvais film peut devenir un bon film" ? Eh bah, c'est pleinement le cas ici. Malgré la présence de Clint Eastwood, ce film policier n'est franchement pas folichon. Cependant, le thème composé par le maestro, même si ce n'est pas son meilleur, colle tellement bien à l'ambiance qui se dégage du film qu'il parvient à en rehausser le niveau.

09 - Django Unchained : Pour moi, sa meilleure collaboration avec Tarantino, mieux encore que Les Huit Salopards pour lequel il a reçu un Oscar. Django Unchained, ça reste avant tout un thème principal grandiose et tellement riche en émotions, en significations. Mais la partition d'Ennio Morricone n'est pas à jeter. Par exemple, en écoutant le morceau ci-dessous, on a l'image des souffrances endurées par Django lorsqu'il était esclave, mais aussi du justicier qu'il est devenu ensuite, cherchant à délivrer de leurs chaînes ceux qui sont encore esclaves des classes dominantes !

The Braying Mule, un morceau d'anthologie du film !

08 - Pour Une Poignée De Dollars : Ça étonnera peut-être certains de voir ce film aussi bas dans le classement mais on sent que le thème composé par Ennio manque encore d'expérience, qu'il ne révèle pas toute la classe que le maestro saura répandre par la suite. Le thème de Et Pour Quelques Dollars De Plus, qui est similaire, est déjà bien plus abouti.

07 - Compañeros : Là, on arrive dans des thèmes qui me sont chers. Premièrement, si vous ne connaissez pas ce western, je vous encourage à le regarder. Il y est encore question d'une liberté à acquérir et, surtout, le film est porté par deux mastodontes du genre, Franco Nero et Tomas Milian. Deuxièmement, si vous écoutez le thème là tout de suite, vous pouvez être sûrs que vous l'aurez en tête pendant plusieurs jours. C'est vraiment le genre de thème tellement bon et tellement millimétré qu'on ne parvient pas à s'en débarrasser.

Attention, addiction en approche !

06 - Et Pour Quelques Dollars De Plus : J'en parlais juste au-dessus. Deuxième collaboration avec Sergio Leone et on sent déjà les progrès accomplis en terme de composition en l'espace d'un an. Le sifflement est juste magique et préfigure déjà les musiques mythiques de duels que l'on aura sur Le Bon, La Brute Et Le Truand ou sur Il Était Une Fois Dans L'Ouest.

05 - Le Professionnel : Non, je ne suis pas chauvin mais juste in love de la bande-son. Le fameux Chi Mai que l'ami Ennio avait déjà utilisé quelques années auparavant dans un obscur film italien. Chi Mai, c'est Bébel' agent secret, c'est Bébel' avec un gros pétard, c'est Bébel' en quête de vengeance, mais c'est aussi Bébel' assassiné d'une rafale dans le dos aux pieds de son hélicoptère.

Oh ! Mais j'ai déjà entendu ça dans Royal Canin Le Professionnel !

04 - Le Clan Des Siciliens : Hormis Le Parrain, je ne connais pas d'autre thème qui retranscrit mieux l'ambiance mafieuse d'un film que celui-là composé par le maestro. Bon d'accord, c'est un peu répétitif car le thème ne varie quasiment jamais durant tout le film. Mais c'est culte ! Et puis il a été réutilisé dans Astérix aux Jeux Olympiques pour la première scène de Jules César... joué bien évidemment par Alain Delon...

03 - Le Bon, La Brute Et Le Truand : Le thème est archi culte. Tout le monde le connaît, même ceux qui n'ont jamais vu le film. On n'a jamais fait meilleur générique de western que celui de ce long-métrage !

02 - Mon Nom Est Personne : Terence Hill a toujours dit de ce film que c'était le meilleur dans lequel il lui ait été donné de jouer. Moi, je vous dirai que c'est le film dans lequel il y a le meilleur morceau composé par Ennio Morricone dans sa carrière, le fameux The Wild Horde qui accompagne la chevauchée de la Horde Sauvage, une bande de 150 gangsters sans foi ni loi. C'est aussi le combat final de Jack Beauregard seul contre ces bandits. "Tu finiras dans les livres d'Histoire, Jack, dans les livres d'Histoire !"

The Wild Horde, une B.O. sublime pour un film qui ne l'est pas moins !

01 - Il Était Une Fois Dans L'Ouest : On reste avec Henry Fonda pour une B.O. tout simplement sublime, la meilleure d'Ennio selon moi. La chaleur du duel en approche, les notes sombres qui rappellent ces bandits pleins de sueur et de vices, et surtout le son strident de l'harmonica qui annonce à tout bandit de mauvais augure : "Prépare-toi, tu vas dérouiller !"

Avec L'Homme à l'harmonica, les bandits n'ont qu'à bien se tenir !


Bonus n°2 : 5 fun-facts sur le maestro à deviner et à déguster entre amis :

     Les réponses seront publiées très exactement une semaine après la publication de cet article. Les gagnants auront le privilège d'avoir gagné et les perdants auront la tristesse d'avoir perdu.

1/ Interrogé à ce sujet il y a quelques années dans un journal, Ennio Morricone a indiqué quel était, selon lui, le plus grand sport de combat au monde. A votre avis, quel est ce "sport" ?

Réponse : Pour Morricone, le plus grand sport de combat, ce sont les échecs. Voici une partie de ce qu'il a déclaré dans un magazine en 1991 (vous pouvez retrouver l'intégralité de la citation dans le communiqué nécrologique sur la page Facebook de la Fédération Française d'Échecs) : "Le jeu d'échecs est bien plus qu'un simple passe-temps. C'est une chose importante; une philosophie, un moyen de mieux se connaître, un miroir de la lutte de la vie." Avant d'être le compositeur de renom que l'on connaît tous, Morricone voulait d'ailleurs devenir joueur professionnel d'échecs. Il a notamment été formé par Stefano Tatai, un maître international d'échecs. Il a eu l'occasion d'affronter le légendaire Kasparov. Il a même composé l'hymne officiel de l'Olympiade d'Échecs de 2006. Mais bon, ne boudons pas notre plaisir qu'il ait choisi la voie de la musique !

2/ Ennio Morricone a énormément collaboré avec Hollywood. Pourtant, cela n'a pas été toujours simple pour une raison très précise. Laquelle ?

Réponse : Ennio Morricone ne parlait pas un mot d'anglais, tout simplement. Bien souvent, il lui fallait un assistant pour traduire ce que lui disait et ce que les autres cinéastes lui répondaient.

3/ Les films du duo Leone / Morricone ont une particularité que l'on n'a jamais pu voir sur d'autres films. Quésaco ?

Réponse : A la demande expresse de Sergio Leone, Ennio Morricone composait et jouait sa musique directement sur le plateau de tournage, en même temps que la captation du jeu des acteurs. Leone estimait ainsi que cela permettait aux acteurs de mieux s'imprégner de l'ambiance qu'il attendait et donc de mieux jouer.

4/ Sur les 70 millions d'albums qu'Ennio Morricone a vendus, l'un d'eux a fait à lui seul 10 millions. Lequel ?

Réponse : Cela ne vous étonnera sans doute pas si je vous dis qu'il s'agit de la B.O. n°1 dans mon top 10 ci-dessus. L'OST du film Il Était Une Fois Dans L'Ouest est donc celle qui a fait à elle seule 10 millions de ventes dans le monde.

5/ A l'instar de Johnny ou Vegedream, Ennio Morricone a composé la musique officielle d'une des coupes du monde de football. De quelle édition s'agit-il ?

Réponse : Ennio Morricone a composé l'hymne officiel de la Coupe du Monde de Football de 1978 qui se tenait en Argentine. Vous pouvez d'ailleurs retrouver ci-dessous la composition en question :




Cette chronique vous a été servie par le pistolero John Beauregard. Je vous laisse au milieu du désert, sans eau ni munitions, car j'ai un compte à régler avec la Horde Sauvage...

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